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28 octobre 2023
Auteur(s) : 
Yves GILLE
Antoine PIERSON
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Niveau de mise à jour : 4 l

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LA MALADIE TUBERCULEUSE

C’est, en règle, une maladie d’évolution lente.

 1) La pénétration dans l’organisme se fait avant tout par voie respiratoire et plus rarement digestive.
 2) Le bacille est capté par les macrophage.
 3) Il se multiplie (très lentement en général) dans ces macrophages (qui ne parviennent guère àle détruire).
 4) De nombreuses cellules immunocompétentes migrent autour de ces macrophages.
 5) Cet "enkystement" entraîne une anoxie de cette zone.
 6) A ce stade, 4 évolutions possibles :

  • A) auto-stérilisation (rare),
  • B) stabilisation : tout reste en l’état : il y a équilibre entre le BK et l’organisme. Le germe persiste. C’est la primo-infection (évolutions assez fréquente) ;
  • C) ramollissement de la lésion (formation de caséum) avec "creusement", aboutissant à2 possibilités (non exclusives l’une de l’autre) (évolutions moyennement fréquente) :
    • a) effraction et déversement dans une bronche (formation de la caverne) avec dissémination aux autres bronches donc diffusion pulmonaire, et dans l’environnement (contagiosité) ; ceci abouti la destruction pulmonaire ;
    • b) effraction dans un vaisseau avec (surtout si les défenses sont peu actives) dissémination sanguine (septicémie tuberculeuse) àtous les organes (avec prédominance pour poumons (milliaire tuberculeuse), surrénales, rein, organes génitaux, méninges, etc...) ;
  • D) passage àun caractère aigu, avec diffusion pulmonaire et septicémique brutale et intense àla suite d’une baisse importante des défenses (probablement ancienne phtisie galopante) (évolution exceptionnelle).

ASPECT DU GERME

 Bacille (àstructure de paroi de Gram +, mais se colorant pas par la méthode de Gram),
 acido-alcoolo-résistant c’est àdire qu’après coloration au Ziehl il n’est pas décoloré, contrairement àtoutes les autres bactéries pathogènes, par un mélange d’alcool et d’acide,
 il se présente volontiers en bacilles assez longs, fins, souvent un peu flexueux et granuleux. Ils sont généralement réunis en amas, rappelant les corynébactéries ;
 dans les prélèvements pathologiques (au moins dans les pays occidentaux) ils sont généralement rares ou extrêmement rares àtel point qu’il est fréquent de ne pas les voir àl’examen microscopique : le sensibilité de la microscopie, faite dans les règles de l’art (20 mn d’examen microscopique), par rapport la culture, est en France de seulement 30 et 50 %.

CULTURE

Les mycobactéries tuberculeuses :
 exigent des milieux de culture particuliers,
 ne donnent une pousse visible qu’après plusieurs semaine (4 semaines pour M. tuberculosis et M. africanum, 12 à14 semaines pour M. bovis),
 sont aérobies strictes,
 leur température optimale de croissance est de 36° C.
 les colonies, blanches ou crème, ont généralement un aspect caractéristique.

CARACTERES BIOCHIMIQUES

Ils ne présentent d’intérêt que pour l’identification, après culture, des germes.

ANTIGENICITE, IMMUNITE

Les cires de la paroi ne jouent guère de rôle dans l’immunité
Il existe un polysaccharide qui induit la formation d’anticorps (Ac). Ces Ac ne semblent pas avoir de rôle immunitaire et n’ont pas d’intérêt diagnostic.
Les protéines de mycobactéries sont les substances utilisées dans la cuti-réaction et l’intradermoréaction (IDR) la tuberculine (test de Mantoux) (cf infra).

L’immunité antituberculeuse est caractérisée par le phénomène de Koch [1]. C’est un mécanisme de migration cellulaire : lorsque l’on injecte des protéines de mycobactéries dans un organisme qui, immunologiquement, connaît déjàce germe, des cellules (surtout des macrophages) migrent vers ce point d’inoculation et s’y immobilisent. Le phénomène se détecte (se "lit") par la perception d’une induration, d’une nodosité sous-cutanée (et surtout pas d’une rougeur !). C’est cette propriété que l’on utilise lors des IDR ou cuti-réaction la tuberculine.
Dans sa forme extrême la réaction peut même devenir phlycténulaire (présence de bulles) et être suivi d’une nécrose.

C’est ce même phénomène de Koch qui est responsable des mécanismes de la maladie, pouvant aboutir un enkystement des germes ou une destruction tissulaire (cf. ci-dessus).

Ce phénomène de Koch a un caractère protecteur : tout BK pénétrant dans un organisme protégé par la mémoire immunitaire est, normalement, immédiatement phagocyté et détruit ou rejeté.

Il est impératif de savoir que la mémoire immunitaire concernant le BK est brève, de l’ordre de 6 mois. Ceci signifie qu’une personne débarrassée, spontanément ou grâce un traitement, du germe (que ce soit le pathogène ou celui vaccinal (BCG)) a perdu toute mémoire immunitaire 6 mois plus tard et que, par conséquent, elle peut faire une nouvelle infection ! Pour que l’immunité persiste il est indispensable que le germe persiste dans l’organisme : c’est une immunité "de surinfection".
La "cuti" qui était pratiquée sur les enfants des écoles visait, d’abord, àvérifier que l’immunité était toujours présente, que le germe vaccinal (vivant) n’avait pas été rejeté.

DIAGNOSTIC

 Bien sur ne pas oublier la clinique avec la classique mnémonique : P 3A TV SN qui se traduit par :
• Pâleur,
• Asthénie,
• Amorexie,
• Amaigrissement,
• Température Vespérale,
• Sueurs Nocturnes.

... Mais ne pas oublier que la tuberculose a été dite "la (ou une des !) grande simulatrice"... et c’est bien vrai !
Surtout n’oublions pas d’y penser, surtout dans les pays riches : sous prétexte qu’elle est devenu une maladie rare en Europe, on l’oublie lorsqu’elle n’a pas des signes d’appel typiques (encore dans les années 60-70 tout entrant àl’hôpital avait droit àune cuti-réaction).
Cette maladie persiste, en particulier chez les immigrés et les vieillards... mais ce n’est pas un groupe limitatif, àmoins que l’on ne se considère comme vieillard partir de 2 ans !
 Ne pas oublier l’amaigrissement : un amaigrissement rapide et involontaire est, schématiquement, une tuberculose ou un cancer.
 Ne pas oublier les signes radiologiques, fondamentaux.

DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE DIRECT

C’est la mise en évidence du germe dans les prélèvements : examen direct (microscopie) et culture, essentiellement.

Ici nous n’envisagerons que l’examen direct, la culture, délicate àmettre en oeuvre, nécessitant des moyens assez importants.

La tuberculose pouvant atteindre n’importe quel organe, tous peuvent théoriquement être prélevés pour y rechercher du BK. En pratique, cette recherche est surtout effectuée àpartir des crachats et, plus rarement, des urines et du LCR.

 CRACHATS, SECRÉTIONS PULMONAIRES

  • Il faudra obtenir des sécrétions bronchiques, généralement sous forme de crachats : pour les prélèvements voir Crachats et Expectoration induite,
  • Ces crachats seront soit étalés directement sur lame, soit le seront après fluidification et centrifugation. En pratique, dans les régions ou les tuberculoses sont souvent diagnostiquées àun stade avancé, donc où l’abondance des BK dans les sécrétions est considérable, on conseillera de pratiquer en 2 temps :
    • étalement direct du crachat. Il est possible de rendre le résultat dans les 2 h suivant le prélèvement. S’il est positif on s’arrêtera àce stade. Si non,
    • on liquéfiera le crachat, on le centrifugera 30 mn, si possible à5 000 tours par minute puis on étalera le culot.
  • La lame correctement fixée sera colorée par la méthode de Ziehl àchaud ou àfroid.
  • Elle sera examinée au microscope àx100. Si on ne voit pas rapidement des mycobactéries toute la surface de la lame doit être examinée ce qui prend entre 20 et 25 mn.
On voit un bacille au centre, juste sous un polynucléaire.
On voit au moins 4 bacilles acido-alcoolo-résistants.

RECHERCHE DE L’ADN DE M. TUBERCULOSIS

Avec le matériel ad-hoc et les techniques appropriées, on peut effectue la recherche directement de l’ADN de M. tuberculosis dans divers liquides organiques.
L’intérêt aujourd’hui (2023) indiscuté de la PCR (au moins sur les produits biologiques autres que le sang : cf. infra) réside plus dans la rapidité du diagnostic (comparée àune culture avec identification qui durera de 3 à12 semaines) que dans la sensibilité et spécificité de cette technique qui n’est, sur ces points, pas supérieure àla culture.

Elle est aussi effectuée dans le sang périphérique par PCR mais son intérêt est contesté par certains. Dans un article de 1996 : 88 patients furent testés : 41 eurent un diagnostic de tuberculose positif par les moyens clinico-biologiques classiques. 39 de ces 41 patients eurent une PCR positive (= 2 faux négatifs. Sensibilité 95%). Parmi les 47 patients non tuberculeux, 5 eurent une PCR positive (= 5 faux positifs. Spécificité 89%) (Lancet, 1996, 347, 1082-85).


notes

[1le nom "Koch" est généralement prononcé en français comme un coq. La prononciation allemande que certains français utilisent est "cor".

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